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Bienvenue à la troisième édition de Lexembre sur ce blog. Chaque jour pendant un mois, je vais créer un nouveau mot dans une de mes idéolangues (plus certains de ses dérivés) et digresser en quelques lignes sur un point de grammaire ou de culture.

... Non. Cette année, ce sera un peu différent. J'ai ressorti un vieux projet de roman pendant le mois de novembre pour lequel j'avais vaguement esquissé une langue, celle d'une société voyageant à travers les airs entre des îles isolées du reste du monde. La facilité des communications devait conduire à l'homogénéisation des parlers, et donc une seule langue.

En retravaillant le roman, je me suis rendu compte que la présence dans cette société d'une caste, interdite de vol, et ayant très peu de contact avec le reste de la population devait conduire à l'émergence de dialectes distincts, voire même de langues-sœurs. Je ne pouvais donc pas échapper à la création d'une famille entière.

Fort heureusement, le travail idéolinguistique est encore très peu avancé. Je peux recommencer depuis le début, c'est à dire dériver plusieurs langues-filles à partir d'une langue-mère unique en simulant le passage du temps. Cette méthode, que j'avais appelée pseudo-diachronique dans mon mémoire, est parfaite pour générer des irrégularités et des correspondances entre langues paraissant naturelles.

Ce Lexembre, je vais présenter une racine et ses descendants dans une poignée de langues. Leurs formes, mais aussi leurs sens pourront changer drastiquement. Comme la grammaire n'est pas encore très définie, ces racines seront surtout nominales et les mots obtenus serviront surtout à nommer des personnages et des lieux.

Les langues et leurs environnements

La langue-mère (ci-devant PI pour "proto-île") était parlée il y a un ou deux millénaires par un peuple de marins à un développement technologique et social comparable à celui des locuteurs du proto-polynésien.

La langue-fille principale (ci-devant F pour feui-naan) est employée par une société utilisant l'art (visuel et auditif) pour charmer des esprits. Grâce à ceux-ci, les gens sont capables de relier les îles par la voie des airs. La mer qui les entoure est taboue pour plusieurs raisons. De ce fait, ils vivent exclusivement dans les hauteurs.

Les autres dialectes sont désignés par le préfixe M (pour "maritime") suivi d'un numéro désignant une zone. Ce sont les parlers de la caste héréditaire des croque-morts, qui du fait de leurs activités sont restreints au bord de mer. Pour se déplacer d'île en île, ils ont conservé certaines des techniques de navigation de leurs ancêtres, mais les voyages sont moins fréquents que chez les locuteurs de F, et les innovations linguistiques sont parfois restreintes à quelques groupes d'îles, favorisant la fragmentation dialectale. Le stade intermédiaire entre PI et les dialectes actuels est appelé PM (pour "proto-maritime")

Modèle de présentation

*racine //, informations grammaticales, "sens"

  • forme en F // "sens"
  • forme en PM // "sens"
    • forme en M1 // "sens"
    • forme en M2 // "sens"
    • etc.

Informations culturelles.

talak- /ˈtalak/ v.int « res­sem­bler à X, agir comme X »

Ce pré­fixe crée des verbes intran­si­tifs à par­tir de noms d’hu­mains et d’a­ni­maux, plus rare­ment d’ob­jets natu­rels. Il est par­ti­cu­liè­re­ment pro­duc­tif pour dési­gner des défauts.

Le -l final du pré­fixe sup­prime les consonnes ini­tiales de la racine ; si l’une d’entre elle est une vélaire (k g ṅ), le pré­fixe a la forme tał-. Seule la consonne v n’est pas concer­née et peut appa­raître après le -l et le .

Mots dérivés

  • talas­sa- /taˈlasːa/ v.int (*assa, vieille racine pour « abeille »)
    bour­don­ner
    • talas­sous /taˈlasːuːs/ n.I (-ous)
      bour­don­ne­ment
  • tał­valē- /ˈtaʟʋalɛː/ v.int (kvalē « étour­neau »)
    aller et venir, être inconstant
    • tał­valēus /ˈtaʟʋaleːu̯s/ n.I (-ous)
      incons­tance

takil- /ˈtakil/ v : « exXer, Xer hors de, déXer »

Sur un verbe de mou­ve­ment, ce suf­fixe ajoute l’i­dée de « sor­tir de », « quit­ter », un mou­ve­ment qui s’é­loigne du locu­teur ou du point de référence.

Comme je n’ai tou­jours pas de racines de verbes de mou­ve­ment, pas­sons tout de suite au sens qu’il donne aux autres verbes : ces­ser de faire une action en cours de route, défaire le résul­tat de l’ac­tion. La dif­fé­rence avec le suf­fixe -bis, qui peut éga­le­ment signa­ler une action non menée à son terme, est que l’ar­rêt du pro­ces­sus est volon­taire dans le cas de -il.

Mots dérivés

  • dīl- /ˈdiːl/ v.tr (dī- « tenir »)
    lâcher subi­te­ment ; aban­don­ner (quel­qu’un)
    • dīlek­nos /ˈdiːlɛknos/ n.I (-eknos)
      chute
    • dīlous /ˈdiːluːs/ n.I (-ous)
      aban­don
  • fełil- /ˈfɛʟil/ v.tr (feł- « vou­loir »)
    reje­ter, refuser
    • fełi­lek­nos /ˈfɛʟilɛknos/ n.I (-eknos)
      refus, rejet
    • fełi­li /ˈfɛʟili/ n.E (-li)
      capri­cieux, capricieuse
  • keippā­sil- /ˈkeːpːaːsil/ v.tr (keippās- « faire remar­quer »)
    cacher à, dis­si­mu­ler à
    • keipppā­si­lai /ˈkeːpːaːsilai̯/ n.E (-ai)
      conspi­ra­teur, conspiratrice
    • keippā­si­laks /ˈkeːpːaːsilaks/ n.E (-ks)
      per­sonne trompée
    • keippā­si­lek­nos /ˈkeːpːaːsilɛknos/ n.I (-eknos)
      secret ; men­songe (par omission)
  • kēp­til- /ˈkɛːptil/ v.tr (kēpt- « tuer »)
    gra­cier, épargner
  • koi­dil- /ˈkoi̯dil/ v.tr (koid- « don­ner »)
    reprendre ; voler
    • koi­di­lai /ˈkoi̯dilai̯/ n.E (-ai)
      voleur, voleuse
    • koi­di­li /ˈkoi̯dili/ n.A (-li)
      sou­ris
    • koi­di­lous /ˈkoi̯diluːs/ n.I (-ous)
      vol
      • tme­koi­di­lous /tmɛˈkoi̯diluːs/ n.I (tme-)
        gre­nier mal construit, qui laisse l’ac­cès à la vermine
  • sāmil- /ˈsaːmil/ v.int (sām « mou­rir »)
    res­sus­ci­ter, com­battre la mala­die avec succès
    • sāmi­lek­nos /ˈsaːmilɛknos/ n.I (-eknos)
      gué­ri­son

āta­kaks /ˈaːtakaks/ n.I : « lieu où l’on X »

Ce sché­ma forme des noms de lieux sur des verbes, exac­te­ment comme le sché­ma tme-ous ; mais contrai­re­ment à ce der­nier, ā‑ks n’est pas très pro­duc­tif. Seuls les verbes de mou­ve­ment peuvent le prendre. Lorsque ces deux sché­mas sont en concur­rence, tme-ous dénote plu­tôt le lieu habi­tuel de l’ac­tion, quel que soit son aspect, tan­dis que ā‑ks dénote un objet concret cultu­rel­le­ment déterminé.

Avec une racine com­men­çant par une voyelle, le pré­fixe a la forme āt-

Mots dérivés

Aucun pour l’ins­tant : le stock de racines avec lequel j’ai com­men­cé le Lexembre ne conte­nait aucun verbe de mou­ve­ment. Il fau­dra attendre le 1er jan­vier pour appli­quer ce sché­ma à de nou­velles racines.

tako­bis- /ˈtakobis/ v : « souXer ; Xer en secret ; Xer fai­ble­ment ; com­men­cer à Xer »

Ce suf­fixe s’ap­plique à des verbes et pos­sède une grande varié­té de sens qu’il serait impos­sible de décrire en détails dans ce billet.

Sur des verbes de dépla­ce­ment, -bis pré­cise que le mou­ve­ment s’ef­fec­tue par le des­sous. Par exten­sion, il s’ap­plique à d’autres verbes pour signi­fier que l’ac­tion s’ef­fec­tue en secret, en par­ti­cu­lier à l’aide de forces magiques. Tou­jours en lien avec l’i­dée que l’ac­tion est réa­li­sée de telle manière qu’on ne la remarque pas, il peut signa­ler une action non menée à son terme ou au résul­tat déce­vant. Et en par­lant d’ac­tion pas encore menée à son terme, il est tout natu­rel d’ob­te­nir aus­si un sens inchoa­tif (« com­men­cer à »).

Après consonne (sauf nasale), il a la forme -obis.

Mots dérivés

  • jēpa­di­bis- /ˈjɛːpadibis/ v.tr (jēpa­di- « embra­ser, enflam­mer »)
    ten­ter d’al­lu­mer un feu
  • kēp­to­bis- /ˈkɛːptobis/ v.tr (kēpt- « tuer »)
    tuer par magie
    • hankēp­to­bi­saks /ˈhankɛːptobisaks/ n.I (han-ks)
      branche d’arbre employée pour jeter un sort (en taillant des encoches dans la direc­tion de la per­sonne à tuer)
    • kēp­to­bi­sai /ˈkɛːptobisai̯/ n.E (-ai)
      sor­cier, sorcière
  • pses­so­bis- /ˈpsɛsːobis/ v.int (pses­so- « gran­dir »)
    mal gran­dir, être tordu
    • pses­so­bi­saks /ˈpsɛsːobisaks/ n.E (-ks)
      nain ; bossu
  • sām­bis- /ˈsaːmbis/ v.int (sām- « mou­rir »)
    tom­ber gra­ve­ment malade ; être vic­time d’un sort
    • sām­bi­sous /ˈsaːmbisuːs/ n.I (-ous)
      mala­die mortelle